Référendum Et Démocratie Au 21e Siècle : Une Remise En Cause

AuthorPaul Carey
PositionSenior Sophister LLB (ling franc) (Candidate), Trinity College Dublin. The author would like to thank Gavin Radford for his helpful comments and suggestions on an earlier draft of this article and the Editorial Board for their contributions
Pages47-64
(2018) 17 COLR 47
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RÉFÉRENDUM ET DÉMOCRATIE AU 21E SIÈCLE : UNE REMISE EN CAUSE
Paul Carey*
A L’INTRODUCTION
Après la réalisation choquante du ‘Brexit’ en juin 2016, la portée et la nécessité des
référendums a fait l’objet d’un examen attentif par des politologues et des juristes partout dans
le monde. Cet évènement a montré l’impact sérieux et réel qui peut émaner du phénomène du
référendum. Cependant, le référendum peut aussi donner lieu à des changements politiques qui
sont largement considérés de façon positive, comme le référendum français en 2000 qui a
introduit le quinquennat, et peut voire entraîner un élargissement des droits de l’homme,
comme la réussite du référendum sur le mariage pour tous en Irlande en 2015.
1
Autrement dit,
le référendum n’était qu’un mécanisme réservé pour susciter un changement constitutionnel
capital qui avait pour ambition de protéger contre une modification constitutionnelle
irréversible. De nos jours, la portée du référendum va bien au-delà d’une sauvegarde
constitutionnelle.
2
Il est vu comme un véritable véhicule de changement social. Cela se
démontre, par exemple, par les campagnes actuelles des deux côtés du débat qui encercle le
référendum sur le droit à l’avortement qui aura lieu en mai 2018. Ceci étant dit, on peut citer
plusieurs exemples d’où le référendum était une barrière au changement social notamment
en Suisse, où le droit de vote sur le plan fédéral n’était accordé aux femmes jusqu’en 1971 à
cause de l’échec de plusieurs référendums sur le suffrage féminin pendant le vingtième siècle.
3
Cependant, comme nous voyons fréquemment dans les domaines du droit et de la science
politique, la théorie et la pratique de l’interaction entre les référendums et la démocratie sont
très différentes. Cet article entreprend de remettre la notion du référendum comme mécanisme
essentiel de la démocratie en question.
* Senior Sophister LLB (ling franc) (Candidate), Trinity College Dublin. T he author would like to thank Gavin
Radford for his helpful comments and suggestions on an earlier draft of this article and the Editorial Board for
their contributions.
1
Pour une réflexion compréhensive sur ce référendum, voir : Johan A Elkink et autres , ‘Understanding the 2015
Marriage Referendum in Ireland : Context, Campaign and Conservative Ireland’ (2017) 32 Irish Political Studies
361.
2
Matt Qvortrup, Referendums Around the World (Palgrave Macmillan 2014) 14.
3
Yannis Papadopoulos, Démocratie Directe (Economica 1998) 3.
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Le référendum est un outil par lequel le peuple d’un pays peut se prononcer en faveur ou contre
une mesure proposée soit par les gouvernants d’un pays, soit par une initiative populaire. Le
concept du référendum est souvent lié à celui de la souveraineté populaire, et est considéré,
ainsi que les élections au suffrage universel direct, d’être l’un des moyens que possède le
peuple pour exercer sa souveraineté. Le référendum est un processus pour légitimer les actions
ou les propositions du gouvernement en théorie, les questions les plus importantes de l’état
sont présentées aux citoyens qui peuvent ainsi démontrer leur soutien ou leur objection.
L’approbation du peuple d’une nation est considérée le moyen le plus légitime d’engendrer un
changement crucial dans un pays (comme, par exemple, l’adhérence à l’Union Européenne ou
la légalisation du divorce) et peut éviter des contestations juridiques à l’avenir. Cependant, il
est avancé dans cet article que le référendum est aussi utilisé par certains gouvernants afin
d’éviter le manque d’appui populaire qui suivrait une réforme législative impopulaire, ou
même de recueillir des votes avant une élection. De plus, la plupart de référendums n’offrent
que deux options, généralement ‘oui’ ou ‘non’,
4
qui, quoique pratique, limitent le pouvoir du
peuple de donner leur point de vue sur un enjeu particulier. Par exemple, le référendum
irlandais de 2013 sur l’abolition du Sénat n’offrait que deux options son anéantissement ou
la maintenance du statu quo tandis qu’il y avait un appel large pour une troisième option qu’il
soit réformé.
5
Le mot ‘référendum’ est largement devenu aujourd’hui synonyme de l’idée de ‘démocratie’,
mais le concept et la portée du référendum varient considérablement d’un pays à un autre.
Comme Ranney l’explique, les référendums ont été utilisés sous des régimes autoritaires, se
référant au fait que Hitler en a organisé un pour chercher le soutien du peuple pour
l’élargissement de ses pouvoirs et son instauration comme Führer (bien que le seul choix sur
le bulletin de vote soit de l’approuver) et d’autres souverains autoritaires, comme Mussolini et
Saddam Hussein, s’en sont servi pour justifier leur pouvoir en montrant que le peuple lui
4
Le référendum suédois sur le nucléaire est une exception ici, trois propositions différentes étaient présentées
au peuple. Voir: ‘Swedish Nuclear Power Policy: A Compilation of Public Record Material’ (University of
Goteborg 2003) >
visité le 3 mars 2018.
5
Harry McGee, ‘Ten Reasons Voters Rejected the Abolition of the Seanad’ ( The Irish Times, le 6 octobre 2013)
lition-of-the-seanad-1.1551909>
visité le 3 mars 2018.

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